Le second cours de psychologie (en collaboration avec Médiformation) introduit à l’étude des relations entre l’anatomie du cerveau et les comportements humains (semestre 1 - 1.1.S1).
Approche globale
Champ d'étude
La psychophysiologie correspond à l'étude des relations entre l'anatomie du cerveau et les comportements humains.
Elle permet de faire des liens entre des zones cérébrales et certaines capacités fonctionnelles comme la compréhension du langage ou le fonctionnement de la mémoire.
Elle a également permis d'infirmer ou de confirmer des hypothèses du fonctionnement cognitif.
Les avancées technologiques de ces quarante dernières années permettent aujourd'hui de faire des liens fonctionnels fondamentaux entre le ressenti subjectif et son expression psychophysiologique.
Les perspectives promises par ces technologies sont faramineuses et nous vous invitons à rester attentif à ce champ de la recherche scientifique, car il pourrait permettre des compréhensions révolutionnaires sur ce qu'est l'humain dans son ensemble.
En quoi cela peut-il intéresser les étudiants ?
Cette première partie va permettre aux étudiants de retrouver certaines croyances populaires persistantes que nous pouvons avoir sur le cerveau et ainsi commencer à établir des bases plus stables pour comprendre un peu mieux ce que protège la boîte crânienne.
Nous redécouvrirons donc d'où vient la bosse des math, le lien entre les gros cerveaux et l'intelligence (incluant bien sur la comparaison entre les cerveaux des hommes et des femmes...), ce qu'est la matière grise, ou encore d'où vient cette idée que nous n'utilisons que 5% de notre cerveau !
Pour une approche universitaire, commencer l'étude de la psychologie par celle du système nerveux permet de mettre en place des connaissances anatomiques qui permettront de mettre en relation le corps, étudié dans d'autres matières, et l'esprit, étudié ici.
Posséder une base de connaissance en psychophysiologie permet également d'assimiler de façon plus pragmatique la psychologie cognitive étudiée dans la prochaine partie du cours.
Historique
Avant de rentrer dans le vif du sujet, penchons nous sur les racines de cette science du cerveau. Avoir en tête les origines d'un savoir permet de comprendre les difficultés de sa mise en place, mais surtout d'avoir une idée des perspectives envisageables.
De l'antiquité au XIXème siècle
Égypte antique (18ème siècle avant j.-c.) : Des archéologues ont découvert des papyrus de chirurgiens détaillant des correspondances entre certaines blessures à la tête et des troubles, essentiellement moteurs, dont pouvaient souffrir leurs patients.
Grèce antique (3ème s. avant j.-c.) : l'hypothèse du cerveau comme siège de la pensée, de l'intelligence et du contrôle du corps est communément admise ainsi que l'existence de deux types de nerfs : les nerfs moteurs et les nerfs des sentiments. Une partie du cerveau servirait à bouger et une autre à ressentir.
France au 17ème s. : Descartes fait de l'épiphyse, petite glande située à la base du cerveau, le siège de l'âme. Il développe également une position philosophique distinguant clairement le corps de l'esprit. L'auteur du Discours de la méthode, analyste éclairé, mais conservant un rapport très fort au religieux, réaffirme ce postulat gnostique d'un esprit emprisonné dans un corps. L'influence de cette pensée est restée dans notre culture comme un héritage dont il est encore aujourd'hui difficile de s'extraire.
Début du XIXème siècle : Frantz Gall s'intéresse aux bases biologiques du comportement et développe la phrénologie, système théorique subdivisant le cerveau en fonction des variations des bosses du crâne, estimant que les qualités développées par un homme ont surdéveloppé certaines zones de son cerveau, déformant ainsi sa voute crânienne.
Gall a ainsi étudié la forme des crânes de prisonniers pour faire des liens entre leurs bosses et leurs crimes. De la même manière, il a déterminé la bosse de l'intelligence en étudiant la forme des crânes de ses amis qu'il savait intelligents...
Vous l'aurez compris, la fameuse bosse des maths est bien un lointain souvenir de la phrénologie. Il va sans dire que cette pseudo science, si elle a été populaire en son temps, n'a pas débouché sur des découvertes fiables.
Le XIXème s. marque la mise en application du siècle des Lumières avec la mise en avant de la rationalité scientifique. Les pseudo sciences, comme la phrénologie ou le mesmérisme (le magnétisme animal), font place aux expérimentations rigoureuses.
Ainsi, pour ce qui nous concerne, l'étude des troubles du fonctionnement cognitif en lien avec l'anatomie permet progressivement de construire les bases de la psychophysiologie.
1848 : le cas Phineas Gage. Un contremaitre, travaillant sur les voies ferrées, a été accidenté alors qu'il plaçait des explosifs à l'aide d'une barre à mine. Son lobe frontal a été transpercé par cette barre de métal. Il en résulta un changement progressif de ses comportements sociaux, principalement son inhibition, de son caractère et de sa capacité à programmer ses actions. Cette lésion a détruit la zone cérébrale correspondant au contrôle et à la régulation sociale. Il a ainsi perdu la capacité à inhiber sa frustration, son indifférence ou sa colère alors qu'il s'agissait, avant l'accident, d'une personne polie et respectueuse des convenances sociales.
1861: l'aire de Broca : cette région de l'hémisphère gauche a été découverte par l'autopsie de « Tan Tan ». C'était le surnom d'un homme qui avait la particularité de comprendre ce qu'on lui disait mais ne pouvait parler qu'en employant la syllabe « tan ».
Après autopsie, il s'est avéré qu'il existait une lésion de la taille d'une balle de ping-pong au niveau de l'aire associative du lobe frontal gauche, vers la tempe, qui lui rendait impossible la construction de phrases. Pour l'anecdote, quand il était en colère il pouvait également lancer un juron, toujours le même: « sacré nom de Dieu »... pour l'anecdote, mais pas seulement, car il pourrait s'agir d'un exemple de plasticité cérébrale motivée par une énergie forte, celle de la colère (la plasticité cérébrale sera développée dans la partie sur le système nerveux central).
1874 : l'aire de Wernicke. Wernicke, un neurologue allemand, met en évidence une zone qu'il nommera « aire de Wernicke » ayant trait à la compréhension du langage. Il avait un patient qui parlait, mais ce qu'il disait n'avait aucun sens. Il s'exprimait en une série visiblement aléatoire de mots associée à une anosognosie, c'est-à-dire que le sujet n'a pas conscience de ses troubles.
Ce trouble de la compréhension du langage est lié à cette aire située dans les aires associatives du lobe temporal.
Vers 1910, Broadman synthétise les observations des anatomistes mettant ainsi en évidence 52 aires aux fonctions différentes. Les aires sont décrites ici:
Les techniques contemporaines
L'EEG (électroencéphalographie). La première version date de 1929. Il s'agit d'une technique consistant à capter l'énergie électrique émise par les neurones. L’EEG peut capter des variations d'information électrique avec une précision d'un millième de seconde, ce qui permet de suivre les variations cérébrales face à un stimulus donné. Il permet d'étudier le sommeil, le langage mais surtout les épilepsies (des décharges anormales des cellules cérébrales). La précision de l'E.E.G. s'est nettement améliorée ces dernières années.
La M.E.G. (magnétoencéphalographie) capte les champs magnétiques issus de l'activité électrique des neurones. Il s'agit d'une machine imposante, encore aujourd'hui la technologie la plus précise de localisation cérébrale (une précision de 2 ou 3 millimètres). Elle reste actuellement un outil de recherche mais ouvre des perspectives cliniques très variées.
La TEP (tomographie par émission de positons) date des années 70. Elle est la seule technique permettant de suivre le parcours d'une molécule dans le cerveau, un radiotraceur. Cette technique consiste en l'introduction d'une molécule radioactive (sans danger) dans le sang dont l'émission sera captée par des caméras. Elle est employée en clinique pour mettre en évidence des tumeurs cérébrales, mais d'autres applications sont à l’étude, par exemple, le diagnostic de maladies neuro-dégénératives.
L'IRM (imagerie par résonance magnétique) est un scanner avec des aimants très puissants permettant de percevoir le magnétisme de certaines molécules.
L'IRMf, f correspondant à fonctionnelle, permet de capter les variations du débit sanguin et ainsi la stimulation de certaines zones cérébrales. Sa précision, de l'ordre de 1 millimètre, est supérieure à celle des autres techniques, ce qui fait de l'IRMf le meilleur outil actuel de localisation. Elle est utilisée pour détecter les altérations fonctionnelles du cerveau, comme on peut en trouver chez des patients dépressifs ou schizophrènes.
Conclusion
Nous venons de voir un historique sommaire de la psychophysiologie ainsi que les outils et techniques employés. Cette première partie permet ainsi d'enraciner ce champ du savoir dans ses aspects les plus concrets, ses applications mises à part.